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«Jazz sous les Pommiers», un modèle d’éclectisme (2ème partie)

Écrit par sur 21 juin 2025

Pour la 44ème année consécutive, le festival « Jazz sous les Pommiers » a réussi l’exploit de célébrer les cultures mondiales dans un tourbillon de notes étincelantes. De L’African Jazz Roots à Salif Keïta, ce sont des dizaines d’artistes, venus d’horizons très divers, qui ont illuminé la petite ville de Coutances en Normandie dans le nord-ouest de la France. La témérité des jazzmen, l’authenticité des bluesmen, la vigueur des fanfares, la verve des rappeurs, tout semblait concorder.

Le 29 mai 2025, un quartet de véritables acrobates du jazz enthousiasmait les amateurs de swing improvisé. Ce jour-là, Chris Potter (saxophone), Larry Grenadier (contrebasse), Eric Harland (batterie) et Gonzalo Rubalcaba (piano) démontraient qu’une rencontre inédite pouvait susciter des moments uniques d’effervescence musicale. Chacun d’eux est un maître dans son art et peut s’enorgueillir d’avoir joué avec les meilleurs instrumentistes de la planète. Leur maîtrise respective du vocabulaire harmonique et rythmique leur permet toutes les audaces devant des spectateurs ébahis. L’effet de surprise n’est pas seulement destiné au public. Ces quatre trublions, réunis sous l’appellation « First Meeting », se surprennent eux même et jouent avec leurs propres limites.

« Ce qui nous motive, c’est l’imprévisible. Il faut savoir réagir instantanément. Si vous acceptez d’être surpris, vous acceptez donc les différences et de jouer avec les différences. Un créateur ne doit rien attendre de la musique dans laquelle il se plonge. Il faut rester ouvert, écouter les autres, être prêt à recevoir autant sur le plan spirituel qu’émotionnel et musical. Voilà ce qui compte. Se concentrer sur un élément spécifique importe peu. Que vous soyez Cubains, Américains ou Français est secondaire. La musique dépasse tous ces enjeux ». (Le pianiste cubain Gonzalo Rubalcaba au micro de Joe Farmer)

Pour parvenir à cette philosophie de vie artistique, il faut être un musicien aguerri mais aussi un aventurier. Il faut savoir se laisser porter par le moment sans idées préconçues, sans préjugés, accueillir les accents sonores de ses partenaires de scène et les magnifier. « Nous apprenons les uns des autres. C’est tout l’intérêt ! Cela suppose une sacrée dose de confiance et de compréhension mutuelle. Il faut être sur le coup constamment. C’est le sel de l’improvisation, ne jamais s’attendre à quelque chose de précis. Cela n’interdit pas de se reposer sur une composition. Il vous faut seulement un thème de départ sur lequel vous pouvez vous amuser à loisir. Nous savons sur scène où nous voulons vous emmener mais l’effet de surprise rend l’exercice beaucoup plus intéressant. La beauté de ce groupe « First meeting », c’est justement de ne pas chercher de dénominateur commun. Le nom de l’orchestre « First meeting » est, à ce titre, très explicite. Nous agissons comme si nous nous rencontrions pour la première fois. Cela nous permet de prendre des directions musicales très variées. Tout repose sur la confiance que nous nous accordons ». (Le batteur américain Eric Harland sur RFI)

Le festival « Jazz sous les pommiers » a, certes, pris le risque de bousculer les aficionados en leur proposant un répertoire exigeant et périlleux mais l’interprétation magistrale de ce quatuor exceptionnel a effacé instantanément les premiers doutes et questionnements.

Le lendemain, 30 mai 2025, c’est un autre univers qui allait fasciner les festivaliers. Le pianiste brésilien Amaro Freitas emmenait son auditoire au cœur de la forêt amazonienne. À l’image de son dernier album Y Y (Prononcez « Yé Yé »), les échos de la nature luxuriante échappés du poumon planétaire ensorcelaient les oreilles les plus averties à travers un jeu de couleurs sonores épatant. Volubile au micro comme devant son clavier, l’hôte d’un soir voyageait dans sa tête jusqu’aux confins d’une terre sud-américaine ancestrale. « À certains moments, j’ai le sentiment de me regarder jouer tant je suis subjugué par les émotions. Au Brésil, nous parlons souvent d’incantation. Ce sont toutes ces légendes qui nous sont parvenues des temps anciens et qui racontent le monde, la vie sur terre, les animaux, la nature, les forêts, les rivières. Certaines personnes en ce bas monde ont le pouvoir de ressentir profondément les vibrations de la nature, ce sont ces fameuses incantations dont je vous parle. Quand je suis sur scène, et que je joue ma musique, je me dis : « ce n’est peut-être pas moi qui joue actuellement du piano mais un être spirituel ». Pour atteindre un tel niveau de spiritualité, il faut vraiment le vouloir ! ». (Amaro Freitas, le 30 mai 2025 à Coutances)

L’édition 2025 de « Jazz sous les pommiers » a été un très bon cru. La hardiesse des programmateurs a encore payé. En osant titiller la curiosité, ce festival parvient chaque printemps à se renouveler sans jamais perdre son âme. Un vrai pari… réussi haut la main !

Le Festival Jazz sous les Pommiers

⇒ Le site de Gonzalo Rubalcaba

⇒ Le site d’Amaro Freitas.


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